Saboteur à la solde de CHURCHILL pendant la guerre, résistant en Limousin, père des nageurs de combat français, forestier et pétrolier en Afrique, acteur du dernier film de Jean-Luc GODARD : Robert, dit Bob, MALOUBIER a traversé le XXe siècle comme un aventurier.
Bob MALOUBIER, c'est aussi une gueule qui ne passe jamais inaperçue dans les cérémonies commémoratives du maquis limousin. Une « grande gueule » même, glissent ses rares détracteurs. Moustache blanche façon major des Indes, oeil pétillant, blazer bleu marine avec le blason du Special Boat Service (SBS, nageurs de combat britanniques) dont il est breveté, insigne des nageurs de combat français en or au cou : l'homme en impose.
Sans oublier une faconde rare pour raconter sa vie sans jamais se prendre au sérieux. Bob MALOUBIER, fils de bonne famille, né à Neuilly-sur-Seine le 2 février 1923, est l'un des trois derniers survivants de la section française du Special operations executive (SOE), créé par Winston CHURCHILL en juillet 1940 pour saboter et désorganiser les armées allemandes en Europe occupée.
Ami de Fernand BONNIER DE LA CHAPELLE, auteur de l'attentat contre l'amiral DARLAN en décembre 1942 à ALGER, Bob MALOUBIER s'engage dans le SOE à 19 ans. « C'était le début de l'aventure », dit-il. Parachuté en France à deux reprises, notamment dans le Limousin au lendemain du débarquement, Bob MALOUBIER combat aux côtés du colonel GUINGOUIN, multiplie les sabotages et est blessé à deux reprises.
Il quitte l'armée britannique avec le grade de capitaine et la prestigieuse décoration DSO (Distinguished Service Order). Une décoration accordée seulement à une soixantaine de Français pendant la guerre.
De cette période, il garde « un peu de nostalgie » et laisse échapper son émotion quand il parle de ses camarades tués, comme Violette SZABO, agent de la section française du SOE, parachutée avec lui le 8 juin 1944, à SUSSAC, en Haute-Vienne, arrêtée deux jours plus tard à Salon-La-Tour, en Corrèze, et exécutée début 1945 à Ravensbrück.
Après la guerre, il entre dans les services français pour dix ans. Au service de documentation extérieure et de contre-espionnage (SDECE, devenu DGSE), Bob MALOUBIER participe à la création du service action et fonde en 1952, avec Claude RIFFAUD, l'unité des nageurs de combat.
Les deux hommes dessinent même leur montre de plongée. BLANCPAIN, une maison suisse d'horlogerie réputée, sort en 1953 le premier modèle de la FIFTHY FATHOMS (50 brasses, soit 91 mètres, la profondeur à laquelle elle doit encore fonctionner). Cette montre, devenue mythique, sera adoptée par les NAVY SEALS, les plongeurs de combat américains.
Forestier au Gabon, il rencontre ALBERT SCHWEITZER, devient pétrolier chez SHELL, met sur pied la garde personnelle du président gabonais Léon MBA en 1965, sous l'égide de Jacques FOCCART. En 1967, il est en poste pour SHELL à LAGOS lorsqu'éclate la guerre du BIAFRA.
Officiellement à la retraite, il se lance à 63 ans dans une carrière d'écrivain, racontant sa vie de saboteur et d'agent secret avec quatre livres publiés. Sans illusion sur ses talents littéraires, il assure être « un écrivain du dimanche qui n'aura jamais le Goncourt » .
Il campe un rôle de vieil espion dans le dernier opus de Jean-Luc GODARD, le film Socialisme , sorti en 2010.
Robert MALOUBIER s'est éteint lundi 20 avril 2015, à l'âge de 92 ans.
Ce grand combattant volontaire, deux fois blessé au combat, titulaire de 3 citations, était chevalier de la Légion d'honneur et avait reçu de nombreuses décorations, notamment : Croix de guerre 1939/1945, Croix du combattant volontaire, médaille de la Résistance, médaille des Evadés. Le Royaume Uni lui avait attribué le Distinguished Service Order ainsi que l’ Order of the British Empire. Robert MALOUBIER était par ailleurs, commandeur de l’Ordre du Million d’Eléphants du Laos.