Emile René Gueguen naît le 13 février 1925 à Kerfraval, près de Morlaix.
C'est un garçon intelligent, débordant de vitalité, et cherchant constamment le dépassement de soi. Il obtient le titre de champion de Bretagne "cadets" de course à pied. Dès l'occupation allemande en 1940, il accomplit des actes de résistance à titre individuel, puis est admis dans un groupe "action" du mouvement Libération-Nord.
Le 6 juillet 1944, ce maquisard de 19 ans tombe dans une embuscade tendue par des parachutistes allemands et des feldgendarmes qui l'embarquent dans un side-car. Il parvient à sauter en marche et à s'enfuir sous les rafales des armes automatiques du convoi. Cinq mois plus tard, le 10 décembre 1944, le sous-lieutenant Gueguen, à la tête d'une section composée d'une trentaine d'adolescents, participe au bouclage de la poche de Lorient où d'importantes forces ennemies sont encerclées. Six cents vétérans du 683e bataillon de fusiliers marins de la Kriegsmarine tentent de passer en force et lancent un assaut sur le talus derrière lequel est postée la section Gueguen. Avec leurs moyens légers d'infanterie, les adolescents vont faire front et repousser l'attaque, ainsi que celles qui suivront durant plusieurs heures, et qui bénéficient d'un soutien d'artillerie. Les Allemands y perdront de nombreux soldats, tués, blessés et prisonniers. Ce fait de guerre extraordinaire provoque la stupéfaction admirative des forces alliées.
En 1947, Emile Gueguen, qui est un sportif accompli, est major de sa promotion à l'Ecole Normale Supérieure d'Education Physique de Paris. En 1950, il gagne le titre de champion du monde de pentathlon militaire et international de course d'orientation. Il crée et entraîne l'équipe de France de pentathlon moderne qui
remporte une médaille aux Jeux Olympiques de Mexico. Il est également à l'origine de la méthode sportive qui remplace la méthode Hébert dans les armées françaises.
En 1951, le lieutenant Gueguen a 26 ans. Il part pour l' Indochine où il prend le commandement de la 16e compagnie de parachutistes. Du 3 au 8 octobre, celle-ci, qui a un effectif de 200 hommes, va combattre isolée face à un régiment Viet-Minh, lui infligeant des pertes sévères. La 16 reçoit deux citations à l'ordre de l'Armée et est la seule unité à pouvoir arborer deux palmes sur son fanion.
En 1958, le capitaine Gueguen est en Algérie, à Souk Ahras, près de la frontière tunisienne. Il y commande une compagnie légère du 9e régiment de chasseurs parachutistes. Cette unité, composée de 90 appelés du contingent, va être engagée dans la plus grande bataille rangée de la guerre d'Algérie. La 3e compagnie du 9e RCP, qui a été héliportée, se trouve prise en tenaille entre deux katibas fortement armées. Son commandant, le capitaine Beaumont, déja blessé une première fois dans l'engagement, est tué au combat.
Submergée par le nombre, la 3e compagnie y laisse 28 tués et de nombreux blessés La compagnie du capitaine Gueguen doit alors affronter le 4e faïlek, bataillon de choc de l'ALN, fort de 300 combattants aguerris. Au terme d'un engagement acharné, les parachutistes du capitaine Gueguen parviennent à arracher la victoire.
En 1967, il crée et entraîne l'équipe de France de pentathlon moderne qui remporte, pour la première fois dans cette discipline, une médaille de bronze aux Jeux Olympiques de Mexico en 1968. Il est également à l'origine des nouvelles méthodes de formation physique et sportive dans les armées françaises.
En 1969, à 44 ans, le colonel Gueguen, qui est promis à une haute destinée, préfère quitter l'armée pour prendre la direction du centre international olympique de Vittel. En 1986, il publie un livre autobiographique, "Volontaire", publié par les Editions Grasset à Paris, puis, en 1988, il part vivre en Californie où il s'emploie à renforcer les liens d'amitié entre les Etats-Unis et la France. Il est l'organisateur du saut effectué le 5 juin 1994 sur Sainte Mère Eglise par quarante parachutistes vétérans américains lors du cinquantième anniversaire du débarquement de Normandie, le Jour-J ou D-Day. Consultant en histoire, Emile Gueguen est membre de la Société Napoléonienne Internationale depuis 1995.
Emile Gueguen, "Milic", comme l'appelaient ses amis, décède le 15 février 2003, à l'âge de 78 ans, aux Etats-Unis.
Au cours d'une carrière militaire suscitant l'admiration, et d'une destinée exceptionnelle qu'il s'est lui-même forgée, ce grand combattant volontaire, qui a été élevé à la dignité de grand officier de la Légion d'Honneur, a reçu douze citations. Il est notamment titulaire de la croix de guerre 1939-1945, de la croix
de guerre des T.O.E., et de la croix de la valeur militaire avec palmes. Il a toujours fait preuve au combat d'un esprit chevaleresque reconnu par tous ses adversaires, Allemands, Vietnamiens et Algériens.
L'une des expressions favorites de ce magnifique soldat était : "Quelle connerie, la guerre..."